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Après la fausse-couche

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J’avais donc commencé à te raconter mon voyage spécial PMA en Espagne pour cette grossesse de la dernière chance, l’attente avant le test de grossesse positif le matin de Noël. J’avais également rédigé une chronique (que tu ne liras pas) sur mon premier trimestre de grossesse (sans vouloir me jeter des fleurs, elle était enjouée et drôle – j’avais même fait des blagues en comparant l’échographie du premier trimestre à un contrôle fiscal, c’est dire le niveau) et puis… et puis lors d’une stupide écho de contrôle il y’a quelques semaines, à 3 mois et demi de grossesse, on s’est rendu compte que le cœur ne battait plus depuis quelques temps déjà.

Voilà. C’est aussi stupide, idiot, et déprimant que cela.

J’ai chroniqué le récit assez précis de cette fausse-couche en plein confinement sur mon blog, si cela t’intéresse. Mais aujourd’hui j’aimerais plutôt te parler de l’après.

Crédit photo (creative commons) : Andreas Wohlfahrt (Pixabay

L’après, entre tristesse et soulagement

C’est la question qui m’obsède quelque peu ces derniers temps: que reste t’il d’une grossesse après une fausse-couche? Quand la grossesse a eu le temps d’exister, d’être annoncée, mais qu’elle s’achève à l’aube du premier trimestre?

Il est vrai que ma fausse-couche rentre dans le champs des fausse-couches dites « tardives » – mais normales malgré tout, parce qu’ayant eu lieu dans les 3 premiers mois de la grossesse. Normales. Mais qu’est-ce qu’il y’a de normal, dans une fausse-couche, au juste? Et puis c’est quoi, ce mot complètement vide de sens? Il n’y a rien de « faux », dans une fausse-couche. Tout est vrai, tristement, terriblement réel.

Malgré tout, je réalise que je vis cette fausse-couche bien mieux que je ne l’aurais cru. Malgré les nombreux espoirs investis dans cette « grossesse de la dernière chance », malgré les traitements hormonaux, le stress inhérent à une PMA à l’étranger et les kilomètres avalés à coup d’avion, je me sens beaucoup plus sereine que lors de mes IMG, à 5 et 6 mois de grossesse – qui m’avaient laissée totalement démunie et dévastée.

Je n’ai pas eu à vivre l’incertitude du dossier médical et des examens qui s’enchaînent pendant des semaines, ni la décision terrible à prendre de devoir poursuivre ou interrompre la grossesse.

J’ai également bien mieux vécu ce curetage, face à mes précédents accouchements. Parce qu’une anesthésie générale, c’est effrayant, et dans le contexte d’une fausse-couche c’est également absolument bouleversant . Mais, sans m’avancer à dire que je relativise, ni vouloir comparer ces expériences entre elles, je suis malgré tout soulagée que le décès ait eu lieu si « tôt », pour m’éviter d’avoir à vivre de nouveau l’accouchement et des adieux déchirants.

Pourtant, perdre un bébé à 3 mois et des brouettes, ce n’est pas anecdotique, loin de là. Oui, bien évidemment, je suis triste. Très triste, même. Mais je ne parviens pas à être en colère, et mes moments d’abattement, quand ils surviennent, demeurent de courte durée.

J’en arrive même à ressentir de la gratitude.

Parce qu’après avoir été admise en urgence pour un curetage, j’ai appris que j’étais victime d’une infection totalement asymptomatique. Alors est-ce cette infection qui a tué le bébé, ou n’est-elle que la conséquence de son décès? Je n’en sais encore rien. J’aurais toutes les raisons du monde d’en vouloir à mon corps, ce corps qui ne « comprend » pas que le bébé est décédé et ne déclenche pas la fausse-couche normalement attendue. Ce corps qui ne provoque aucune fièvre, ni aucun autre indice d’aucune sorte pouvant me laisser à penser qu’il se passe quelque chose de plus grave.

Ce que je sais, en revanche, c’est qu’en raison du manque de symptômes, cette infection aurait pu me tuer. Et je mesure tout à fait la chance d’avoir été en capacité de déceler la mort fœtale in utero de mon bébé lors d’une échographie de contrôle qui n’aurait normalement jamais du avoir lieu, puisqu’elle n’était pas obligatoire.

Le deuil d’une nouvelle maternité

Le plus compliqué aujourd’hui, c’est de faire le deuil d’une nouvelle maternité. Parce que le chemin s’arrêtera là pour moi. Parce que je me sens plus la force, ni la capacité de retenter une nouvelle grossesse.

Bien évidemment, je pourrais en vouloir à la terre entière ou me lamenter sur mon sort, mais je refuse d’en arriver là. J’ai au contraire l’immense chance d’être la maman d’une petite fille absolument formidable, et d’avoir épousé l’amour de ma vie. Le reste… et bien le reste se construira à 3, et non à 4, comme je l’aurais pourtant tant souhaité. J’ai connu suffisamment de coups durs ces dernières années pour savoir que le chemin qui s’offre à nous, c’est aussi celui que l’on choisi de prendre.

Il est donc grand temps pour moi de me recentrer sur moi, et sur ma famille. De prendre le temps de perdre – enfin- ces kilos de grossesse que je n’avais plus l’énergie de perdre, « parce que je ne sais pas quand je retomberai enceinte et que ce serait con, quand même, de devoir tout recommencer ». De m’investir de nouveau dans mon travail à 200%. De ne plus seulement être « Julie, la peut-être-future-maman », « Julie, celle qui a perdu 3 bébés », mais Julie, l’épouse de Jean-Mi et maman (presque) accomplie de Kate.

4 grossesses en 6 ans, dont 3 interrompues, on peut dire que cela laisse des traces, et je ne veux pas de cette grossesse de trop qui viendrait porter un coup fatal à mon moral, à ma famille, ou à mon mariage. Qui risquerait de mettre une nouvelle fois ma santé en danger, aussi.

48 heures après ma sortie de l’hôpital, je jetais ainsi mes vêtements de grossesse à la poubelle et je me réinscrivais à Weight Watchers. Triste, mais soulagée d’avoir enfin la réponse à cette question qui me taraudait depuis bientôt deux ans: serai-je de nouveau maman un jour? Non. Et bien soit.

Est-ce que cela signifie que je ne reviendrai plus par ici? Bien sur que non! J’ai encore tant de choses à te raconter sur Kate, 4 ans et demie. Sur le deuil périnatal (je suis devenue intarissable sur le sujet, à force). Et puis même si j’ai déjà 36 ans, une petite voix me murmure au fond de moi « il te reste encore 3 embryons… et si? ». Avec Jean-Mi, nous laissons la porte entr’ouverte à des peut-êtres. Je ne sais absolument pas ce que nous déciderons de faire in fine d’ici quelques années. Sans doute nous retrouverons-nous parfaitement heureux de notre situation, à l’aube de nos 40 ans, à ne plus songer aux nuits sans sommeil, à gâter notre enfant unique de belles robes qui tournent, et à nous nourrir d’autres projets. Je me retrouve aujourd’hui bien incapable de te dire de quoi demain sera fait, mais je sais que nous avons aujourd’hui toutes les cartes en main pour ne pas nous perdre en chemin.


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